Face à la multitude de technologies disponibles, à la complexité des produits et services qui va croissant dans une économie mondialisée, il ne semble plus possible pour une entreprise d'innover seule, aussi grande soit-elle. Mais comment identifier les bons partenaires puis suivre la collaboration au cours du temps? Comment faire en sorte que les échanges soient fructueux? C'est à ces questions que le scouting technologique essaie d'apporter des réponses. Bien développé, il ouvre sur l'intelligence technologique. Mais pour être efficace, le scouting implique une modification de l'organisation de l'entreprise autour de l'innovation.
Face à la multitude de technologies disponibles, à la complexité des produits et services qui va croissant dans une économie mondialisée, il ne semble plus possible pour une entreprise d’innover seule, aussi grande soit-elle : les ressources humaines, technologiques et financières de toute organisation sont limitées. Par ailleurs la nécessité d’atteindre son marché le plus vite possible en minimisant les risques pousse les entreprises à s’ouvrir et mettre en commun leurs connaissances dans des partenariats qu’elles espèrent gagnant – gagnant. Les relations de type donneurs d’ordre / sous-traitants tendent à s’effacer au profit de collaborations dans les secteurs les plus concurrentiels.
La démarche d’Open Innovation est déjà ancienne. Elle a été popularisée par Henry Chesbrough à travers l’étude comparative des pratiques de Lucent Technologies et CISCO Systems, opposant une activité de R&D de pointe mais complètement internalisée au sein des Bell Labs chez Lucent et une pratique d’innovation ouverte sur son écosystème universitaire et entrepreneurial chez CISCO. Si l’image de l’entonnoir percé a maintenant conquis le monde de l’innovation, une question reste en suspens : comment identifier et qualifier le ou les bons partenaires puis suivre la collaboration au cours du temps ? Le scouting technologique, dont l’objet principal est l’identification et l’appropriation par une firme de compétences ou connaissances stratégiques pour son avenir mais en dehors de son écosystème traditionnel, offre un moyen de répondre à ces questions.
L’innovation ouverte selon Henry Chesborough
Il a, lui aussi, sa petite histoire. L’aventure du groupe Procter & Gamble est souvent citée à titre d’exemple. Au début des années 2000, le groupe cherche à rendre ses biscuits apéritifs plus ludiques. Un employé a alors l’idée d’imprimer des images à l’aide d’une technologie jet d’encre sur des chips de pomme de terre. Ce projet, au départ simple, devient rapidement un casse-tête : les chercheurs de Procter & Gamble (P&G) s’aperçoivent que chaque chips doit être imprimée alors qu’elle sort de la friture, humide et à haute température, que plusieurs couleurs sont nécessaires, avec une bonne résolution sur des milliers de chips par minute tout cela avec des encres alimentaires qui respectent des règles d’hygiène et sécurité très strictes.
P&G décida alors de traiter différemment ce sujet en rédigeant un cahier des charges du problème à résoudre qui fut diffusé dans le réseau privé et institutionnel du groupe pour voir si une solution n’était pas déjà connue. C’est d’une boulangerie de Bologne, en Italie, que vint la réponse. Celle-ci était dirigée par un chercheur qui par ailleurs fabriquait des équipements. Il avait déjà eu l’idée d’imprimer des images sur des pains et des gâteaux et n’avait besoin que de quelques ajustements pour répondre aux besoins de P&G. En 2004, la « Pringles Print », avec des questions et des blagues directement imprimées sur la chips, était lancée et elle connut un succès commercial. Elle fut développée en moins d’un an pour une fraction de ce qu’elle aurait coûté si le projet avait été conduit en interne.
Fort de ce succès, le groupe évolua d’une approche centralisée de l’innovation vers une approche fonctionnant en réseau interne globalisé (« Managing Across the Border ») et mit en place son programme « Connect and Develop » (C&D) conçu pour stimuler la Recherche et Développement (R&D) interne de l’entreprise en s’appuyant sur des compétences externes. Cela passa notamment par la mise en place, à l’échelle mondiale, d’un réseau de plus de 70 « scouts », des employés chargés de repérer ces compétences. Leur mission : accompagner et éclairer l’entreprise dans son ressourcement technologique.
Externaliser le scouting?
Mais toutes les entreprises n’ont pas les ressources de PG. En fonction de sa taille, de son secteur d’activité, de sa maturité sur le sujet de l’innovation et de son ouverture vers le monde extérieur, une firme va pouvoir mettre en œuvre plusieurs stratégies.
Dans un premier temps, l’externalisation de l’activité de scouting technologique est tentante. Il est ainsi facile de missionner une société extérieure pour apporter une réponse technologique à un problème. Parmi les pionniers, on citera ainsi NineSigma, créée en 2000 aux Etats-Unis, qui propose de connecter des entreprises qui ont des problèmes technologiques avec des organisations capables de les résoudre (universités, laboratoires privés, startups, consultants…) en rédigeant un résumé qui décrit le problème technologique à surmonter et organisant ensuite la relation. D’autres sociétés ont depuis été créées comme par exemple, en France, Presans ou IdexLab. Elles sont au cœur de l’économie de la connaissance, en développant des moteurs de recherche sophistiqués, épluchant les publications, brevets, actes de conférences, elles permettent de qualifier et retenir, parmi les millions d’experts disponibles sur la planète ceux qui sont à même de proposer une solution pertinente, ouvert à une collaboration et accompagnent la mise en relation. D’autres encore, comme le projet B2Brains, visent à utiliser les réseaux sociaux professionnels tel LinkedIn pour identifier les experts. Plus récemment, la plate-forme Deucalion propose une approche originale en proposant à la fois aux porteurs d’une technologie d’en décliner les usages tout en jouant aussi le rôle de mise en relation avec des entreprises ayant une problématique.
Le petit monde des « innovation brokers » ou intermédiaires de l’innovation est donc en pleine effervescence avec de nombreuses initiatives portées par de jeunes entreprises mais aussi par les pouvoirs publics. Dans un autre registre, des agences régionales (en France : pôles de compétitivité, SATT, Agences Régionales de Développement économique) proposent aussi ces services d’intermédiation entre des apporteurs de technologies, qui peuvent être des laboratoires universitaires ou des entreprises, et des firmes qui ont un besoin. Souvent gratuit, ce service couvre néanmoins un espace géographique ou technologique beaucoup plus réduit que l’offre privée. Le scouting technologique commence donc aussi souvent par une parfaite intégration dans son territoire et la connaissance de l’écosystème d’innovation régional et national. Ce dernier point est crucial pour les PME qui n’ont en général pas les ressources pour animer et développer un réseau international.
Mais rapidement peuvent se poser des problèmes de confidentialité ou d’organisation qui amènent l’entreprise à internaliser totalement ou en partie l’activité de scouting technologique. Ce changement culturel vise en priorité les grands groupes et s’articule autour d’actions en faveur du ressourcement technologique externe.
Les stratégies des grandes entreprises
En premier lieu, même si cela peut paraître évident, il faut travailler sa réputation pour devenir un « Partner of Choice », vis-à-vis des laboratoires de recherche et des startups, en matière d’innovation à l’instar de Philips. D’autres firmes comme Google se construisent une image « d’employeur modèle » pour cibler plus particulièrement des individus, futurs collaborateurs, ayant des compétences particulièrement recherchées. Ce positionnement permet à l’entreprise d’attirer en premier lieu les meilleurs talents et d’avoir le choix de ses partenaires exclusifs.
Cela implique assez rapidement une organisation qui facilite la relation entre le grand groupe et la PME, en commençant par l’expression des besoins et le recueil des réponses. On citera, par exemple, la mise en place d’un site internet sur le modèle du groupe SEB avec un back office pour traiter, dans un délai raisonnable, les propositions. Mais ce sont aussi un ensemble de bonnes pratiques comme des outils de « knowledge management » internes efficaces pour le suivi de projet, un fonctionnement spécifique au niveau des achats, la trésorerie des PME étant souvent fragile, une politique propriété intellectuelle favorable aux PME leur laissant des marges de manœuvre pour ne pas qu’elles deviennent dépendantes de leur grands clients, une possibilité de communiquer sur le partenariat… Véritable sujet en lui-même, la problématique de la relation grand groupe – PME en innovation est incontournable et il s’agit de la première barrière à franchir lorsqu’on aborde le thème de l’Open Innovation et du scouting technologique. Ce thème est aujourd’hui largement exploré : on mentionnera l’initiative du Paris Region Lab et de son Club Open Innovation qui fédère la plupart des grands groupes établis sur le territoire français et un très grand nombre de startups pour apporter des réponses concrètes.
Un dispositif de scouting efficace recouvre toujours deux types d’activités. L’une, plutôt sédentaire, consiste en l’analyse extensive de la littérature scientifique et des bases de données brevets avec pour objectif l’identification des meilleures équipes de recherche, une cartographie des réseaux de collaboration ou encore l’élaboration de roadmaps technologiques. Elle peut être complétée par une analyse des flux financiers (fusions/acquisitions, levées de fonds) et des projets collaboratifs subventionnés. Si la mise en œuvre de tels outils est déjà un pas important pour une meilleure compréhension de l’environnement externe, il est insuffisant pour deux raisons. La première est liée directement à la matière étudiée : un projet met du temps à se monter, une publication est la conséquence de recherches et sera publiée près d’un an après l’obtention des résultats, un brevet reste confidentiel 18 mois… L’analyse des bases de données est donc une photo de la situation avec environ un an et demi de retard. Par ailleurs, pour déclencher un projet d’innovation, une relation de confiance qui nécessite un contact précoce avec les détenteurs de la technologie est toujours nécessaire.
C’est pour cela qu’en plus des outils logiciels d’intelligence technologique, un réseau de personnes physiques – les scouts – est aussi nécessaire. Souvent expérimentés, ayant une fine connaissance du processus d’innovation, un bon relationnel, bilingues, une forte crédibilité au sein de leur entreprise, une compétence technologique large, autonomes car managés à distance sans objectifs clairs ces scouts présentent un profil rare et très particulier. C’est d’autant plus vrai que leur insertion sur leur territoire de chasse prendra du temps et qu’ils seront souvent eux-mêmes « chassés » pour le réseau qu’ils auront su mettre en place et leurs vastes connaissances.
C’est dans les secteurs les plus concurrentiels que les initiatives les plus remarquables ont été lancées. En France, le projet STELLab (Science Technologies Exploratory Lean Laboratory), initié en 2011 par la direction scientifique du groupe PSA Peugeot Citroën est remarquable car il lui permet de disposer d’un maillage complet et efficace de son environnement technologique. En offrant une visibilité long terme et en étant présent chez ses partenaires académiques dans le cadre d’OpenLabs, en déployant un réseau de « scouts technologiques », à la fois dans des lieux d’excellence scientifique comme l’EPFL à Lausanne ou à Singapour (les STELLab@xxx) mais aussi au sein de ses établissements de production comme à Wuhan en Chine, à Sao Paulo au Brésil ou à Vigo en Espagne, le groupe se fait identifier auprès des laboratoires de recherche, des startups et PME qui auraient des technologies à proposer et leur propose un interlocuteur expérimenté pour promouvoir leur innovation au sein du siège.
Parmi les écueils sur lesquels échouent souvent les idées issues de l’extérieur, le plus fréquent est, en effet, celui du raccordement aux processus de fonctionnement internes traditionnels de l’entreprise. Lorsque le projet d’innovation quitte la phase d’exploration pour passer en développement, production ou commercialisation son succès est intimement lié la capacité d’absorption de l’entreprise qui se définit comme la capacité à reconnaître la valeur d’une nouvelle information extérieure, l’assimiler et l’appliquer à des fins commerciales. C’est lorsque l’organisation est face à une problématique ou un savoir-faire réellement nouveau, qu’elle doit quitter un mode de fonctionnement routinier et décider quels efforts financiers et humains elle doit fournir pour absorber l’innovation. On voit donc que c’est une question spécifique aux grands groupes qui doivent sacrifier à court terme certaines ressources et peut être des gains liés à une spécialisation pour que ses ingénieurs puissent s’ouvrir à des connaissances issues de nouveaux domaines. Le « parrainage » de la découverte jusque dans les phases les plus avales est donc primordial et les grandes organisations qui adoptent une politique d’open innovation mettent souvent en place un processus d’incubation de projet. Il s’agit de substituer au fameux NIH, « Not Invented Here », le PFE, « Proudly Found Elsewhere ».
Parmi les outils de scouting technologique, un dernier outil connaît ces dernières années une montée en puissance : les fonds d’investissement « corporate ». À la recherche d’innovations technologiques, les grands groupes industriels ont constitué des fonds d’investissement pour être capables de prendre des participations dans des startups ou des PME à haut potentiel en lien avec leur activité. Il peut s’agir d’un moyen de « capter » de nouvelles technologies mais aussi de se positionner sur de nouveaux usages, ou pour un groupe industriel de rentrer progressivement dans le monde du service en prenant des parts dans une startup qui serait demain un leader dans une activité s’appuyant sur les produits du groupe. On citera par exemple la prise de participation de General Motors dans la startup RelayRides aux Etats-Unis dans le domaine de l’auto-partage ou le plus remarqué investissement de Google dans Uber. Ce n’est généralement pas la rentabilité de l’investissement qui est le principal moteur du financement comme pour un fond classique. L’intérêt le plus évident de ce Vertical Coporate Venturing est la capacité de la startup à contribuer à la politique d’innovation ouverte et de développer l’activité du ou des industriels propriétaires du fond. Pour cela, ces derniers mettent souvent leurs moyens au service de la PME et ont un ainsi un effet de levier sur l’activité de celle-ci en facilitant la mise en place de sa production ou son accès au marché tout en renforçant ses fonds propres pour qu’il puisse devenir un partenaire robuste financièrement. Outre une opportunité de renforcement des startups scoutées, ces fonds constituent souvent un poste d’observation des nouvelles tendances, des nouveaux modèles économiques et de l’usage des nouvelles technologiques et il est sage que la direction innovation ou prospective du grand groupe propriétaire du fond y soit représentée…
Du scouting à l’intelligence technologique
En s’appuyant sur l’organisation mise en place par Deutsch Telekom, Rene Rohrbeck a montré que le scouting technologique, pour être efficace, implique une modification de l’organisation de l’entreprise autour de l’innovation. Cela ouvre de nouvelles perspectives. Si comme on l’a vu, le scouting technologique vise à identifier et faciliter l’absorption de technologies clés par une entreprise, il vient nourrir directement deux autres types d’activités essentielles. En premier lieu, le management de la technologie dont le rôle est de comprendre et d’établir un business case pour certaines technologies au sein de l’organisation, en arbitrant notamment sur les budgets de R&D. Puis, la prévision technologique qui vise à imaginer le futur, planifier et définir des priorités en termes de projets R&D à mener.
Une organisation ouverte vers l’extérieur au niveau de l’innovation a donc tous les outils et méthodologies en place pour basculer vers l’intelligence technologique. Dès lors qu’une firme est en capacité d’identifier les leaders technologiques qui pourront devenir ses futurs fournisseurs ou partenaires, d’analyser les activités inventives et les acquisitions stratégiques de ses concurrents et partenaires, de surveiller les technologies qui pourraient se substituer à celles qu’elle maîtrise, d’analyser les nouveaux usages liés aux nouvelles technologies à une échelle planétaire nous sommes dans le registre de l’analyse stratégique externe.
Domaine constituant la partie offensive de l’intelligence économique, il s’est surtout développé aux États-Unis, en Inde et plus récemment en Chine autour des travaux de Michael Porter. Les pays européens se sont appropriés l’idée d’avoir une véritable politique d’intelligence économique mais, bien souvent, seule la partie défensive, de protection de l’information stratégique, a réellement été mise en œuvre. Celle-ci est pourtant devenue obsolète. Tout d’abord parce que la plupart des actes d’espionnage sont liés à des facteurs internes ou à la mobilité des salariés. Mais surtout parce qu’avec l’émergence d’une économie de la connaissance, les producteurs de savoir sont incités à divulguer leur science. Les chercheurs publient entre autre parce que cela fait partie de leur évaluation, l’État lui-même incite les PME à déposer des brevets qu’elles n’auront pas les moyens de défendre devant les tribunaux, les startups se signalent aux investisseurs, les salariés sont de plus en plus mobiles et dévoilent leurs expertises et leur disponibilité sur les réseaux sociaux professionnels, il devient aisé de retracer les partenariats technologiques via les projets collaboratifs…
Chercher l’information, analyser les signaux faibles, devient donc une activité stratégique pour les entreprises. Il ne peut y avoir d’innovation et de compétitivité sans une pleine conscience de son environnement : pour créer de la nouveauté, il faut connaître l’existant. Le scouting et l’intelligence technologique seront donc, à n’en pas douter dans les années à venir, des activités clés de toute direction de l’innovation et de la stratégie.
References
- BOOKS
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[OPEN INNOVATION] by (Author)Chesbrough, Henry W on Sep-01-06Henry W Chesbrough
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Open Innovation: The New Imperative for Creating And Profiting from TechnologyHenry William Chesbrough
List Price: EUR 23,60 -
[Open Innovation: The New Imperative for Creating and Profiting from Technology] [by: Henry W Chesbrough]Henry W Chesbrough
List Price:
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- Online
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- Commissariat Général du Plan, Intelligence économique et stratégie des entreprises, travaux du groupe preside par Henri Martre (La Documentation française, février 1994)
- L. Huston, Sakkab N., Connect and Develop: Inside Procter & Gamble's new model for innovation (Harvard Business Review, Vol. 84, No. 3, March, 2006)
- Cohen W.M., Levinthal D.A., Absorptive capacity: a new perspective on learning and innovation (Administrative Science Quarterly, Vol. 35, No. 1, Special Issue: Technology, Organizations, and Innovation, March 1990)
- Rohrbeck R., Technology scouting: a case study on the Deutsche Telekom Laboratories (ISPIM-Asia 2007 Conference)
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